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Mars 2016
Au moins une intervention policière avec coups de feu sur quatre (25,5 %) est reliée à une tentative de suicide par policier interposé (SPI) au Québec. En comparaison, en Amérique du Nord (36,5 %) et en Australie (31,1 %), on parle environ du tiers des interventions policières avec coups de feu qui serait relié à une tentative de SPI1.
C'est du moins ce qui ressort d'une étude menée par la chercheuse Annie Gendron de l'École nationale de police du Québec à partir des dossiers d’enquêtes indépendantes reliés à des événements policiers au cours desquels des individus ont été atteints, mortellement ou non, de projectiles policiers.
«Au cours de la période couverte par l’étude, soit de 2006 à 2010 inclusivement, 47 événements policiers avec coups de feu ont été recensés», note Mme Gendron. «En appliquant les cinq critères de détection (voir la section ci-dessous), il a été possible d’établir que 25,5 % de ces événements étaient reliés à des tentatives de SPI.
«D’autres cas parmi les 47 analysés rencontraient trois ou quatre des cinq critères de détection et pouvaient laisser sous-entendre les intentions suicidaires des individus impliqués lorsqu’ils ont commis une agression ou tentative d’agression grave envers les policiers. Toutefois, par souci de rigueur, ils n’ont pas été établis comme étant des cas de SPI. C’est donc au moins un événement policier avec coups de feu sur quatre au Québec qui est relié à une tentative de SPI. »
L’équipe de Kesic et ses collaborateurs (2012)2 propose cinq critères pour procéder à la détection des cas d’interventions policières reliées à des tentatives de SPI. La personne:
L’analyse approfondie des dossiers d’enquête reliés à ces événements a permis de faire ressortir que tous les individus impliqués avaient des antécédents judiciaires. Ils n’en étaient donc pas à leurs premiers démêlés avec des policiers. La très grande majorité d’entre eux avaient aussi des antécédents suicidaires, une consommation d’alcool ou de drogue problématique ou des troubles de santé mentale.
Une fois sur deux, l’appel à l’origine de l’intervention policière impliquait une personne aux prises avec des conflits conjugaux. Ce portrait avait aussi été mis en lumière dans les autres études qui ont traité la question. À leur arrivée, les policiers ont rapidement été confrontés à des individus armés, la plupart du temps munis d’une arme blanche, qui ont tenté volontairement de commettre une agression dans l’intention d’être mortellement atteints par des projectiles policiers. La durée d’intervention était très courte, laissant peu de temps aux policiers pour tenter de désamorcer la crise.
Tentatives spontanées
Le déroulement de ces événements fait ressortir trois types de situation de tentatives de SPI. La plus répandue parmi les cas analysés implique des individus qui commettent une tentative de SPI « spontanée ».
Il s’agit d’individus en colère et paniqués en raison de l’intervention policière qui se déploie autour d’eux et qui adoptent des conduites suicidaires de manière impulsive « la goutte qui fait déborder le vase ». Très souvent, ces individus avaient confié à des proches qu’ils préféraient mourir plutôt que de retourner dans le processus judiciaire.
Tentatives planifiées
Un autre type de situation est représentée par les tentatives de SPI planifiées. Ces événements impliquent des individus suicidaires qui planifient de manière délibérée d’utiliser des policiers comme moyen de suicide. Lors de ces événements, l’incident ou de délit à l’origine de l’intervention policière est planifié pour attirer les policiers afin de mettre leur plan à exécution.
Suicides auto-infligés
Le troisième type de situation comprend des individus qui ont un plan de suicide auto-infligé amorcé, mais qui se transforme en tentative de SPI lors de l’arrivée des policiers. Ce sont des individus qui sont dérangés par les policiers et qui se tournent vers eux de manière agressive pour parvenir à leurs fins.
Les premières retombées de l’étude ont permis à l’École nationale de police du Québec d’intégrer cette problématique dans une mise en situation où les aspirants policiers sont confrontés à un individu qui tente de commettre une tentative de SPI. Ces derniers peuvent ainsi tester les aptitudes verbales qui leur sont enseignées notamment axées sur la désescalade et la résolution de conflits, en plus d’avoir l’opportunité de s’entraîner à la maîtrise de soi en situation de stress.
Pour consulter la présentation Powerpoint de l'étude
Pour communiquer avec la chercheuse Annie Gendron
___________
1- Le suicide par policier interposé (SPI), communément appelé « suicide by cop », est une manifestation pouvant être observée lors d’une intervention policière nécessitant l’emploi de la force. Les chercheurs qui se sont penchés sur la question définissent le SPI comme étant un moyen de suicide par lequel une personne agit délibérément d'une manière menaçante vis-à-vis un représentant des forces de l'ordre dans l’intention de provoquer une réponse mortelle.
2- Kesic, D., Thomas, S. D. M., & Ogloff, J. R. P. (2012). Analysis of fatal police shootings: Time, space, and suicide by police. Criminal Justice and Behavior, 39(8), 1107-1120.